Les origines
G.Bateson a découvert que les individus
se comportent de façon déterminée par les réactions de leur entourage.
Pour lui, la Psychologie doit se focaliser sur le réseau relationnel de la personne et non sur son seul univers intrapsychique.
Des fameuses « conférences Macy » émerge une nouvelle science de la communication et du contrôle : la cybernétique.
Il s’aperçoit également qu’au sein des
messages échangés, des ensembles de messages de différents niveaux
d’abstraction peuvent entraîner une situation paradoxale.
John Weackland
La théorie de la « double contrainte »
voit finalement le jour. La maladie mentale est considérée comme un
trouble de la communication. C’est la concrétisation d’un nouveau
paradigme dans les sciences humaines d’une importance considérable. Elle
implique une vision systémique de la maladie mentale.
J.Haley et J.Weackland se rendent à
Phoenix et rencontrent régulièrement Milton.H.Erickson. Leurs échanges
vont marquer profondément les travaux de Palo Alto.
G.Bateson n’est pas très intéressé par
la psychothérapie et ne souhaite pas limiter son champ d’étude à la
seule schizophrénie. En 1959, Don Jackson fonde le Mental Research Institute (MRI) mais Bateson n’y participe pas. Virginia Satir ne tarde pas à rejoindre le MRI.
Le MRI porte une nouvelle épistémologie.
La question centrale devient : comment modifier les règles du système
familial pour que le symptôme porté par l’un de ses membres disparaisse ?
L’objectif est de modifier la structure du système familial. Peu importe l’origine du problème, l’essentiel est qu’il s’exprime ici et maintenant.
Richard Fisch
Il n’est pas nécessaire que l’individu comprenne son rôle dans le maintien du problème, il faut modifier les règles relationnelles.
Il s’agit d’entraîner un changement de comportement des membres du
système pour modifier les interactions et que le symptôme devienne
inadéquat et inutile.
Il faut plus observer les actions des gens que leurs interprétations. Commencent les séances filmées et enregistrées.
D’une attitude neutre et bienveillante, le thérapeute devient interventionniste.
Il est un agent actif du changement. Il se met à prescrire des taches
comportementales à réaliser pendant la séance ou à la maison.
Dès 1963, Jay Haley pose les bases de la thérapie brève
: définition d’un objectif précis d’intervention, nécessité d’un rôle
actif interventionniste du thérapeute, focalisation sur le présent
plutôt que sur le passé, priorité au changement comportemental plus qu’à
la prise de conscience, utilisation du langage injonctif et des
techniques paradoxales comme vecteur de changement…
L’arrivée de Richard Fisch va précipiter la création en 1967 du Centre de Thérapie Brève,
lequel a pour but de rendre intelligible une thérapeutique qui provoque
le changement. Le nombre de séances est limité à dix. Le thérapeute
doit fixer un objectif réaliste. On parle d’objectif minimal. Le rôle du thérapeute devient résolument actif.
Virginia Satir
Dans la lignée d’Erickson qui a beaucoup
influencé mais est resté indépendant, l’objectif de la thérapie est le
changement souhaité par le patient et l’important est d’avoir des résultats concrets.
Le modèle d’intervention
Il obéit à trois postulats de base :
Une difficulté habituellement passagère
devient un problème lorsqu’elle a été gérée de façon inadéquate et que,
la difficulté n’étant pas résolue, on répète la même solution, encore et
encore (prémisse étiologique).
Un problème ne perdure que dans la
mesure où il est maintenu par le comportement du patient ou les
interactions entre le patient et son entourage (prémisse cybernétique).
Si le comportement qui alimente le
problème est éliminé ou modifié de manière appropriée, le problème
disparait et redevient une simple difficulté (prémisse de l’action thérapeutique).
Tout individu cherche à maintenir un équilibre
face aux perturbations du milieu interne et externe. Tout changement
significatif amènera donc une réponse de la personne visant à
neutraliser la perturbation et rétablir un état satisfaisant.
Le cas échéant, la personne utilisera
d’autres possibilités faisant partie de son répertoire comportemental et
ceci jusqu’à ce que les conditions de perturbation disparaissent. Elle
va s’adapter au changement.
Une fois une difficulté considérée comme
un problème, si celui-ci n’est pas résolu, toutes les personnes qui en
souffrent se mettent à l’exacerber, à travers un cercle vicieux,
par des rétroactions positives inadaptées. La difficulté est traitée
par des tentatives de solution qui ne font que l’intensifier.
L’objectif du thérapeute concerne l’ensemble de l’interaction patient-environnement et doit donc garder une position méta
par rapport au problème du patient. Le thérapeute ne doit pas régler le
problème mais faire en sorte que le patient trouve lui-même les moyens
de dépasser ses propres comportements, retrouve des ressources de
régulation autonome.
Le thérapeute est donc à la fois actif et observateur de sa propre interaction.
Son intervention va utiliser le propre
cadre de vie du patient. Il doit répondre aux questions suivantes : qui
souffre de la situation ? Quel est le problème ? Quelles ont été les
tentatives de solution ? Quel serait l’objectif minimal indicateur d’une
amélioration ?
Il convient d’abord de définir celui qui
dans le groupe familial supporte le moins la situation et va mobiliser
le plus le changement. Il potentialise par ses actions les résistances
des autres et donc l’homéostasie.
Le thérapeute fait décrire le plus
précisément possible les conditions de survenue du problème et les
interactions qui s’ensuivent. Il travaille sur un problème circonscrit, avec des séquences comportementales claires.
Les tentatives de solutions
C’est le concept phare du modèle de Palo Alto. En cherchant la caractéristique commune
à tous ces essais infructueux, le thérapeute obtient une information
d’un niveau supérieur sur l’attitude générale du patient à l’égard de
son problème.

Le travail se fait à la fois au niveau cognitif (recadrage) et comportemental (injonctions)
Un objectif réaliste
« Cherchez toujours un objectif concret dans un futur proche » (M.H.Erickson)
Il faut amener le patient à faire une
expérience relationnelle différente. Il va alors la renouveler,
l’étendre, la généraliser jusqu’à devenir une classe de comportements.
Lorsque l’objectif est limité,
le patient voit plus facilement les améliorations, sa motivation est
augmentée, il s’attribue plus facilement la responsabilité de la bonne
évolution.
Si le thérapeute adopte une position basse permanente, il doit rééquilibrer la relation en ne dérogeant pas à son cadre.
Le questionnement dans la clarification
du problème permet de caractériser les choses sous un angle moins
pathologique et non diagnostique mais plus contextuel, ce qui libère le patient.
Stratégies de changement
L’acte thérapeutique essentiel est d’amener le patient à renoncer à ses tentatives de solutions inadéquates. Il fait l’expérience d’une interaction différente avec son environnement. Une diversité apparaît dans ses conduites, il a fait preuve de créativité.
Les comportements du patient sont
sous-tendus par des prémisses cognitives génératrices de problèmes. Le
thérapeute doit d’abord discerner la cohérence de ces prémisses, le
« langage » du patient et modifier cette vision du monde pour
« recadrer » le problème et faciliter le changement de comportement
souhaité.
Les injonctions de comportements
Le thérapeute propose un changement comportemental à 180 degrés. Il demande de faire l’inverse de ce qui était fait comme tentative de solution.
Le patient change son regard sur son monde
Mais le thérapeute doit prendre garde au
type de relation établi avec le patient, à la position de son patient
et au langage du patient (explicitant sa vision du monde)
Définition de la relation : bien entendu, le lien de coopération doit être solide pour proposer une tache paradoxale.
La position du patient
est l’ensemble des croyances, des valeurs et des priorités personnelles
qui déterminent les manières d’agir ou de ne pas agir par rapport au
problème en question. Si la tache proposée rencontre l’attitude
émotionnelle dominante (colère, peur, abnégation, souffrance…) du
patient face au problème, elle sera acceptée et mise en oeuvre.
L’injonction
doit établir des liens implicites avec ce niveau émotionnel pour éviter
des réactions défensives. La position du patient est un concept subtil,
au thérapeute de saisir, dans le cours des conversations, la façon dont le patient ressent la situation.
C’est une position non normative, il ne faut surtout pas « faire
prendre conscience » au patient de l’inadéquation de son comportement.
Cerner la structure et la logique du « langage » du patient.Valider la vision du patient (pas d’attitude critique)
Introduction de nouveaux éléments dans cette vision (variété)
Proposition d’actes spécifiques qui vont tenter de modifier de façon comportementale la manière dont le patient tente de trouver des solutions à son problème (recadrage)
Le recadrage : tout
individu organise cognitivement et émotionnellement son contact au
monde. Cette structure mentale est hiérarchiquement organisée et possède
sa propre cohérence.
Les injonctions sont des directives paradoxales.
Dans un cadre censé apporter le changement, le thérapeute va prescrire
de ne rien changer, il cherche la saturation du problème.
Ne pas fournir de solutions.
Ne pas prendre une position experte,
plutôt conserver une relation égalitaire (sauf pour le maintien du
cadre et la prescription injonctive). « Je ne peux vous aider que si
vous m’aidez à vous aider »
« La première chose à faire en
psychothérapie est de ne pas contraindre l’être humain à modifier sa
manière de penser, il est préférable de se ranger à ses vues, de les
modifier peu à peu et de créer des situations dans lesquelles l’individu
modifiera lui-même volontairement sa manière de penser » (M.H.Erickson, in Zeig, la technique d’Erickson)
Pour faciliter la potentialisation des capacités de changement du patient, le thérapeute doit se placer en position basse. Une attitude pessimiste, validant les échecs, crée un contexte favorable, un défi à relever.
Douter du bien-fondé de l’amélioration est une technique qui permet de neutraliser les craintes qu’entraine toute perspective de changement, même positif.
Les différences avec l’approche psychanalytique
- La durée du traitement : une dizaine de séances.
- L’absence d’intérêt porté au passé : seul le présent détient les clés de la solution.
- L’analyse fige les modèles de représentation du monde que le patient possède déjà. Dans une optique constructiviste, les théories sont transitoires et changeantes.
- Le contact au monde n’est pas seulement cognitif, il ne s’agit pas essentiellement de comprendre mais d’être en interaction, dans de nouveaux mouvements adaptatifs.
- Le thérapeute n’est pas neutre, il est actif et interventionniste.
Recueil d’articles fondateurs, une partie théorique et une partie pratique passionnante pour les cliniciens.
Ouvrages de référence de J.HALEY
Article écrit par Frédéric BERBEN
Psychologue clinicien, Psychothérapeute, Hypnothérapeute
Cabinet : 135 Rue du Ponceau, 53000 Laval. Tel : 06 78 24 44 45. Mail : cabinet.berben@orange.fr.
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