samedi 12 octobre 2013

M.WHITE et la Thérapie Narrative

Michael WHITE est né en 1948 à Adélaide en Australie du Sud. Il a fondé en 1983 le « Dulwich Centre » qu’il a dirigé jusqu’en 2007. Il a tragiquement disparu en avril 2008. Il avait commencé sa carrière en tant qu’assistant social avant d’être thérapeute familial pendant 25 ans.

Une philosophie en pratique

Il étudie la pensée de Michel Foucault, Jacques Derrida, Pierre Bourdieu, Gilles Deleuze pour l’articuler à la pratique clinique en thérapie individuelle et familiale. Il s’intéresse aux travaux de G.Bateson, en particulier pour la réintroduction en thérapie de la dimension temporelle. La narration devient une inscription sur une ligne de vie dont on reprend la liberté des choix.
« L’analogie textuelle » permet de considérer l’interaction des personnes comme l’interaction de lecteurs à propos de textes particuliers. L’évolution de l’existence et des relations aux autres sont comme la lecture et l’écriture des textes et chaque nouvelle lecture d’un texte est une nouvelle interprétation donc une nouvelle lecture.
Les aspects de l’existence qui tombent en dehors de « l’histoire dominante » (de la personne) sont des moments d’exception. L’histoire dominante néglige ces moments au profit de changements communs à tous les membres d’une catégorie sociale même s’ils apparaissent de manière indépendante chez chacun d’eux.
Il s’agit de se séparer des « discours de vérité » qui assujettissent pour identifier des « savoirs unitaires » en encourageant les gens à repérer les croyances qu’ils ont sur eux-mêmes, sur les autres et sur leurs relations, croyances renforcées et confirmées par la permanence du problème.
« les corps dociles deviennent des esprits animés » (Michael White)
Devenir dépositaire d’un savoir authentique sur sa propre vie redonne le pouvoir à la personne.

La thérapie

Elle prend une forme particulière appuyée sur des analogies topologique et textuelle : des cartes et des récits. Les gens prennent une part active à la narration de leur vie. Les blancs historiques se comblent dans le récit, augmentant la cohérence de la trajectoire et la force du sentiment d’être entier et présent au monde.
La pratique repose sur l’usage de la métaphore littéraire. « La vie est considérée du point de vue de celui qui en fait le récit, elle devient donc une histoire et son narrateur, la personne qui consulte, en est l’auteur. L’identité du narrateur, forgée par son histoire, devient une entité mobile qui peut se redéfinir au gré des narrations. Cette conception narrative de l’identité constitue une véritable révolution en psychologie » (Isabelle Laplante et Nicolas De Beer)

Le « Nouvel Auteur » de son existence
Les clients qui viennent en thérapie croient que les problèmes rencontrés dans la vie sont le reflet de leur identité, de celles des autres ou encore de celle de leurs relations. Cela conditionne tous leurs efforts pour résoudre leurs problèmes, qui se solde par une exacerbation des problèmes. Ils construisent alors une représentation d’eux-même centrée sur le problème, qui devient le reflet de « vérités » sur leur nature, celle des autres ou de leurs relations. Ils finissent par croire qu’ils sont le problème.
La thérapie narrative va tenter de les distancier de cette croyance pathogène.
La représentation finale du client est celle d’un Soi souple et qui définit sa propre adaptation en fonction de ses valeurs intrinsèques, mouvantes au gré de la complexité et de la cohérence nécessaire à la vie.
En utilisant l’imagination, la personne devient le « nouvel auteur » de sa vie.

Les outils thérapeutiques

Globalement, la thérapie va suivre 3 mouvements :
  1. Définition de l’influence du problème sur la vie de la personne : tracer la carte d’influence du problème, identification du problème à externaliser,
  2. Découverte de l’influence de la personne sur la vie du problème : dresser la carte de l’influence des gens, délimitation des moments d’exception, redéfinition de Soi et des relations avec les autres.
  3. Mise en oeuvre d’actions de changement : définition des contres-mesures.
La conversation thérapeutique cherche à aider la personne qui consulte à retrouver sa capacité d’action dans sa vie, reprendre l’initiative, redécouvrir ses ressources et capacités qui se sont trouvées dissimulées par une « histoire préférée ».
Les « conversations externalisantes » sont le moyen de fournir un contrepoint aux interprétations internes, en objectivant le problème, à l’inverse de la pratique culturelle dominante d’objectivation des personnes (par classement, diagnostic, etc…). les gens ont une expérience identitaire distincte du problème. « Le problème cesse de représenter la vérité à propos de l’identité des gens et les différentes façons de résoudre le problème deviennent soudain visibles et accessibles« (Michael White)
Le « récit dominant » occulte les autres histoires possibles (contre-exemples) qui pourraient être écrites à partir d’autres évènements laissés de côté car invalidant l’histoire dominante
La re-négociation des relations avec des personnes significatives de la vie du patient fournit des ancrages pour réécrire une « histoire préférée« 
L’aboutissement est l’écriture d’une nouvelle histoire, non plus à l’insu du client mais en expression de sa liberté et de ses choix, découverte de nouvelles relations et d’une identité auto-référencée.
Michael White explique ainsi la pratique des la thérapie narrative :
« Une thérapie qui se situe dans le contexte du mode de pensée narratif prendrait une forme qui :
  1. privilégie l’expérience vécue de la personne;
  2. favorise la perception d’un monde changeant, en reliant l’expérience vécue à la dimension temporelle;
  3. fait appel au mode subjonctif dans le déclenchement de présuppositions, la mise en place de significations implicites et dans la genèse de perspectives multiples;
  4. encourage la polysémie et l’utilisation du langage ordinaire, poétique et pittoresque dans la description de l’expérience et dans la construction de nouvelles histoires;
  5. invite à une position réflexive et à la reconnaissance de sa participations dans les actes interprétatifs;
  6. encourage chacun à développer le sentiment d’inventer ou de réinventer sa vie et ses relations quand il raconte et re-raconte sa propre histoire
  7. reconnaît que les histoires sont co-produites et sont des tentatives pour établir les conditions dans lesquelles le « sujet » devient un auteur privilégié;
  8. insère constamment les pronoms « je » et « vous » dans la description des évènements
 (Les moyens narratifs au service de la thérapie, 2003, éd fr, p.83)
Les outils narratifs sont multiples et n’ont comme limite que la créativité des thérapeutes. Ils comportent : des lettres d’invitation, lettres de licenciement, lettres de prédictions, lettres de réponse, lettres de recommandation, lettres courtes, lettres employées comme narration, lettres d’histoires de Soi, contre-documents (certificats, déclarations, auto-certification, etc…


Lectures conseillées :
ici                                                                                                                                et là

Vidéo empruntée au site du Dulwich Centre




Article écrit par Frédéric BERBEN
Psychologue clinicien, Psychothérapeute, Hypnothérapeute
Cabinet : 135 Rue du Ponceau, 53000 Laval. Tel : 06 78 24 44 45. Mail : cabinet.berben@orange.fr.

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